#3 : La fracture numérique et la perte de lien

Dans le cadre de la Semaine de la santé mentale, je réponds chaque jour à une question ou un enjeu que vous m’avez fait parvenir.

Aujourd’hui, je vous parle d’une problématique qui a été portée à mon attention et à laquelle on ne pense pas nécessairement quand on vit en plein coeur de Montréal, dans un monde hyperconnecté…

La « fracture numérique » décrit l’inégalité dans l’accès et la maîtrise des technologies de l’information. Concrètement, la fracture numérique résulte à la fois d’un accès inégal à Internet haute vitesse sur le territoire, mais aussi aux grands écarts dans les habiletés technologiques individuels, entre les personnes habiles avec ces outils et ceux qui ne le sont pas.

Au Québec, 12% des ménages ayant un revenu annuel inférieur à 20 000$ n’avaient pas de connexion internet en 2020.
Institut National de Santé Publique du QUébec (INSPQ) 1



Imaginez-vous 2 minutes vous sentir démuni.e face à une inscription en ligne, une transaction bancaire via une application, ou tout simplement le fonctionnement de votre cellulaire… Mettez-vous dans la peau d’une personne qui doit naviguer en 2023 sans accès à Internet… Peut-être êtes-vous même confronté.e à ces difficultés à travers l’aide que vous apportez à un proche ?

À l’heure de ChatGPT, on prend pour acquis la maîtrise des nouvelles technologies… Mais qu’en est-il de ceux et celles qui se sentent dépassé.e.s ? De ceux et celles qui aimeraient parler à une vraie personne au lieu de faire face à un écran et un formulaire à remplir en ligne ? Quel est l’impact par exemple de la fermeture d’une caisse dans un village plus éloigné, qui fait que l’humain est remplacé par un guichet ?

Ça n’a l’air de rien, mais cela représente pour ces personnes une grande perte de lien. Pour ceux qui vivent déjà dans un certain isolement, cela peut représenter un grand stress de ne plus avoir accès à un humain qui l’accompagne et répond à ses questions et doutes. Le lien humain, il est vital. L’humain se nourrit des interactions sociales, c’est un besoin fondamental.

Quand on se sent isolé.e ou totalement dépassé.e par le volume de courriels à gérer et la complexité technologique, il peut également être difficile d’en parler, par honte de ne pas maîtriser ces outils. Et même quand on est habile technologiquement, qu’en est-il du nombre de comptes, de mots de passe, de courriels, de notifications diverses dont on doit faire le suivi au quotidien ?

Fracture numérique : femme découragée devant son ordinateur


Cela peut être une grande source de stress, dans nos sociétés où l’on valorise tellement la rapidité et l’efficacité… On a peur de ne pas être à jour, on a accès à une quantité illimitée de sources d’information. Oui, c’est une bonne chose de pouvoir partager les savoirs et l’information à une vitesse et une échelle jamais vue auparavant. Mais, cela peut aussi devenir un piège, dans une course effreinée au virtuel et au « toujours plus », à la connexion en ligne, mais à la déconnexion avec l’humain et le réel.

Voilà des enjeux qui, personnellement, m’invitent à réfléchir à mon rythme de vie, à ralentir et créer plutôt que d’aller vers mon élan « productif » et efficace.

À juste m’accorder le droit de déconnecter les écrans et de me connecter aux humains.
À ne pas perdre le lien…

1 INSTITUT NATIONAL DE SANTÉ PUBLIQUE (INSPQ), « Inégalités d’accès et d’usage des technologies numériques : un déterminant préoccupant pour la santé de la population ? », Synthèse rapide des connaissances, 2021/6, p. 4 https://www.inspq.qc.ca/sites/default/files/publications/3148-inegalites-acces-usage-technologies-numeriques.pdf